Le Conseil d’administration (CA) vient de s’exprimer en faveur de la transformation écologique de notre Université via l’adoption de sa première “charte en faveur d’une université écologiquement et socialement responsable” , le 1er octobre 2019. Par cette charte, Sorbonne Université « s’engage à jouer pleinement un rôle exemplaire dans cet effort collectif [face aux défis des multiples crises environnementales] ». Quant au plan d’action qui l’accompagne, il devrait être validé par le CA avant 2020. Notre association a participé de son mieux à l’élaboration de ces documents au sein du Groupe de travail que l’université a mis en place au 2e semestre 2018-19. Nous pensons qu’une organisation, des moyens, et une volonté forte de l’Université et de tous ses acteurs seront la clé du succès de la transformation écologique de Sorbonne Université !
Une charte et un plan d’action élaborés de manière participative durant le printemps 2019
Au 1er semestre 2018 notre association, accompagnée des élu·e·s étudiant·e·s, avait présenté au conseil d’administration de SU une motion développement durable, qui engageait l’Université à réaliser une charte, un bilan, et un plan d’action environnemental. Cette motion fut un succès, malgré le fait que certains objectifs (1) proposés par LUPA ne furent pas retenus dans la version finale. Pour plus de détails consulter cet article.
Une fois la motion votée, le président créa le “groupe de travail développement durable”(GTDD), afin d’élaborer ces trois documents (charte, bilan, plan d’action) avant juin 2019. Ce groupe de travail fut piloté par la vice-présidence de l’université, accompagnée par les services de la logistique et du patrimoine, les élu·e·s étudiant·e·s et notre association. Nous nous sommes réunis à neuf reprises entre janvier et juin 2019.
Tout au long des réunions du groupe de travail, nous avons porté avec force nos propositions pour une université écologique. Elles sont regroupées dans le Livret de LUPA que nous avons mis à jour en février 2019 (4). Dès la première réunion, nous avons tenu à intervenir pour rappeler le contexte des multiples urgences écologiques, et pour rappeler l’intention de notre association, c’est-à-dire répondre – à l’échelle de SU – de façon réaliste, scientifique et suffisante à cet enjeu vital pour les générations actuelles et futures (2) (3).
Le débat fut constructif et argumenté. Une bonne partie des propositions de LUPA sont inscrites dans la charte et le plan d’action, bien que souvent avec des compromis. A ce jour, la charte est actée, par le CA de l’Université, le plan d’action a été transmis au président, et le bilan environnemental est en cours. Dans l’ensemble nous sommes plutôt satisfaits des objectifs et actions retenus par l’université.
Que retenir de la charte ?
La charte “en faveur d’une Université écologiquement et socialement responsable”, énumère une liste d’axes stratégiques que SU s’est engagée à poursuivre. Nous vous recommandons vivement de la lire ici. Voici plusieurs points importants:
- SU s’engage à réduire les pollutions de l’environnement dont elle est responsable, à préserver la biodiversité et les « ressources » (5) naturelles, à diminuer significativement ses émissions de gaz à effet de serre (GES) en cohérence avec l’objectif du GIEC (6), et à prendre compte la dimension sociale de la responsabilité environnementale.
- SU s’engage à intégrer les enjeux écologiques dans son enseignement et d’encourager les recherches qui répondent à ces enjeux.
- SU s’engage à diminuer son impact écologique : limiter au maximum sa consommation de ressources et sa production de déchets, diminuer l’impact du déplacement des usagers des campus, etc.
- La politique de protection de l’environnement de SU s’inscrit désormais dans un processus d’amélioration continue. Poser ce principe de non-régression est essentiel pour progresser sereinement et s’assurer sur le long terme du maintien des ambitions écologiques de l’université.
- La communication de la charte, et plus généralement des actions écologiques de SU est cruciale. Sans elle, la communauté ne peut ni se l’approprier, ni s’impliquer dans le processus actuel de transformation. La charte spécifie bien cette exigence. Le vice président en charge du développement durable nous a confirmé sa volonté de communiquer efficacement sur les actions entreprises.
- Le plan d’action écologique quinquennal (qui n’a pas encore été validé en CA) reprend toutes les actions concrètes de la charte, et en intègre d’autres qu’il classe en neuf catégories (7). Il a pour objectif de planifier ces actions au cours des cinq années à venir, et de d’assurer de leur mise en œuvre. Un groupe de suivi veillera à l’avancée du projet.
Les objectifs sont désormais fixés par la charte, mais des points d’attention subsistent
Concernant le plan d’action, il n’est pas encore publié et des zones d’ombres persistent
La charte est désormais officielle, mais toutefois le plan d’action n’est toujours pas publié du fait de retardement de sa mise à l’ordre du jour du CA pour l’officialiser. La présidence nous a indiqué qu’il sera présenté au CA avant la fin de l’année 2019. Nous vous le communiquerons dès que possible.
D’une part, si nous sommes satisfaits du travail effectué, nous estimons que le plan d’action aurait pu être plus ambitieux. Celui-ci ayant été le fruit de compromis, le GT n’a pas retenu toutes nos propositions notamment sur le caractère contraignant des mesures à réaliser. Le GT a constamment préféré « favoriser » une activité écologique plutôt que «d’interdire » une activité néfaste (8).
D’autre part, nous restons vigilant·e·s quant à sa mise en œuvre. La création d’une commission de suivi (mis en place par la présidence) devrait être prévue par le plan d’action pour analyser et coordonner la réalisation des différentes actions, et en proposer de nouvelles. Sa composition n’a pas encore été discutée. Nous ferons notre possible pour que ce groupe soit plus représentatif que le GTDD ne l’était. De plus, il serait important d’intégrer de réels experts chargés de donner des recommandations et d’évaluer les progrès de SU en la matière. Enfin, concernant LUPA, il est a priori prévu que nous fassions partie de cette commission.
Les moyens financiers et humains accordés aux changements annoncés ne sont pas connus à ce jour, il est seulement inscrit dans le plan d’action “qu’une aide logistique nécessaire à son fonctionnement sera apportée”(9).
Le bilan environnemental est en cours de réalisation
A partir du mois de janvier 2019, le GTDD a initié le premier bilan environnemental de Sorbonne Université. Celui-ci est prévu dans le plan d’action, et devra être réalisé régulièrement. Il est confié aux services de la logistique et comprend un état des lieux de la consommation d’énergie et d’eau, ainsi que de la production de déchets (quantité produite et tri effectué). Un bilan des émissions de gaz à effet de serre (BEGES) de SU est également en cours, réalisé avec un prestataire extérieur.
Cependant, ces deux bilans, qui devaient être terminés cet été, ont pris du retard. Le recueil des données s’est avéré compliqué pour certains campus. Nous vous en communiquerons les conclusions dès que possible.
En conclusion :
Nous saluons le travail effectué depuis un an sur la charte et le plan d’action de SU, en collaboration avec différents acteurs de l’Université. Cependant, nous restons conscient·e·s que la charte et le plan d’action à eux seuls ne suffiront pas à transformer notre Université et lieu de travail. Pour mener à bien ces actions il faudra une organisation, des moyens (humains et financiers), et surtout une volonté forte de la présidence ainsi que la coopération active des services, toutes deux nécessaires à une transformation écologique profonde.
Il faudra également que les membres de l’université soient mieux informés de cette transformation, que celle-ci soit davantage réalisée via un véritable processus de concertation (10), et que la communauté universitaire encourage chacun à se mobiliser.
Nous restons sceptiques quant à l’inertie possible de la machine décisionnelle et administrative de l’université. Nous, Les Universitaires Planteurs d’Alternatives, continuons à porter notre plaidoyer auprès de la direction et de l’administration avec conviction et persévérance.
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LUPA a été représentée auprès du GTDD par Camille Lichère, Yanis Nothias, Paul Séjourné et Marc Lamé.
Article écrit par Yanis Nothias et Marc Lamé pour LUPA
Publié le 20 novembre 2019
(1) En effet, il faut souligner que dans la motion développement durable votée par le CA de SU en octobre 2018 (ajouter lien vers l’ancien article de LUPA), la présidence et le CA n’avaient pas retenu les trois autres propositions que nous proposions : cliquez ici pour en prendre connaissance.
(2) Lors de sa prise de fonction l’année dernière, Dominique Pateron, le vice-président “développement durable” (médecin urgentiste de profession), nous avait indiqué être conscient de l’urgence de la situation et vouloir la traiter.
(3) retranscription de l’intervention de LUPA au sujet de l’urgence de l’action de protection environnementale (1ère réunion du GTDD, 30 janvier 2019): cliquez ici pour en prendre connaissance.
(4) En février 2019, nous avions publié et transmis au groupe de travail la 3e édition de notre Livret de propositions pour une université écologique soutenues par les élu·e·s étudiant·e·s au CA, l’Institut de la Transition environnementale (basé à Sorbonne U), et la Mairie de Paris.
(5) Lors des discussions LUPA a proposé les guillemets pour signifier que les « ressources naturelles » sont des entités naturelles pas uniquement considérées en tant que biens matériels exploitables.
(6) A noter qu’à partir de la proposition faite par le GT, la présidence a supprimé l’objectif chiffré de réduction des émissions de GES pour rester sous la barre des 1,5°C (conformément à l’Accord de Paris de 2015), pourtant présent dans la première version de la charte. La version finale de la Charte n’a gardé que la formule suivante: « diminuer les émissions de GES en cohérence avec l’objectif global du GIEC”. Toutefois, c’est une déclaration essentielle car elle inscrit les actions de l’Université dans un cadre scientifique, celui du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du climat. Outre son objectif de comprendre “les risques liés réchauffement climatique d’origine humaine” et leurs “les conséquences possibles de ce changement”, le GIEC a pour but d’envisager d’éventuelles stratégies d’adaptation et d’atténuation” qu’il explique dans ses différents rapports depuis 1990. Enfin, il est vrai que la Charte aurait pu mentionner l’IPBES, l’équivalent du GIEC pour la problématique de la biodiversité.
(7) Le plan d’action proposé par le GTDD est composé de 9 catégories (calquées sur le plan d’action de l’Université d’Aix-Marseille) organisées en sous-catégories à partir des propositions des membres du GTDD (les propositions de notre association ayant généralement constitué leur point de départ). Cliquez ici pour voir la structure du plan d’action.
(8) Plus précisément, le GT (en dehors de LUPA et des élu·e·s étudiant·e·s) a choisi de « favoriser les entreprises écoresponsables : critères environnementaux, d’éthique sociale, de localisation en se basant dès que possible des normes ou certifications reconnues » plutôt que de retenir notre proposition visant à « cesser le financement et les projets de mécénat par des entités qui sont liées au secteur de l’utilisation des énergies fossiles [financement de la fondation Sorbonne Université, de chaires de recherche, de thèses, de contrats de recherche, de colloques, d’associations étudiantes, etc.] ».
(9) Extrait du plan d’action (avant relecture du président): défi n°3-1-3 : « Création d’un groupe de suivi et de propositions (Commission socio-environnementale ?) piloté(e) par le vice-président, chargé d’analyser les évolutions liées au déploiement du plan d’action, le bilan environnemental, les problèmes rencontrés et de faire des propositions d’évolution de ce plan. Une aide logistique nécessaire à son fonctionnement sera apportée. Un bilan annuel de son action sera communiqué ».
(10) cf. principes d’information et de participation posés par la Charte de l’environnement (article 7) et le Code de l’environnement (article L110-1)

dessin: Juliette Baigne